Prof. Isabelle Denis
La procrastination consiste à remettre à plus tard des tâches scolaires malgré les conséquences que cela peut engendrer. Celles-ci peuvent être émotionnelles : anxiété, culpabilité, irritabilité ou frustration, honte, diminution de l’estime de soi ou du sentiment d’efficacité personnelle. Elles peuvent également être fonctionnelles : perte de temps, retards dans les échéanciers, baisse des résultats, échecs scolaires ou diminution de la qualité des apprentissages.
La procrastination est un comportement d’évitement qui peut contribuer à maintenir l’anxiété de performance chez les étudiants universitaires. Elle permet une diminution ou un soulagement immédiat des émotions et des pensées négatives ou anxiogènes en lien avec l’école. Toutefois, à plus long terme, elle ne permet pas de mieux gérer les émotions désagréables associées aux études, ni de trouver des stratégies de résolution de problèmes face aux défis rencontrés pendant les études universitaires.
Toutefois, tout comme d’autres comportements d’évitement, la procrastination se situe sur un continuum allant de la « normalité » vers « l’anormalité ». Nous procrastinons tous à un moment ou un autre sans que cela n’engendre pas nécessairement de conséquences importantes. Lors de mon parcours universitaire, le fait de laver ma vaisselle me paraissait souvent une tâche beaucoup plus agréable ou importante que mon étude; après tout, il est bien plus facile d’étudier dans un endroit propre et bien rangé!
Les études universitaires sont certes exigeantes : l’horaire est chargé, les attentes et les enjeux sont élevés, la fatigue se met souvent de la partie, en plus de la vie personnelle qui comporte des hauts et des bas… Dans ce contexte, il n’est donc pas anormal de procrastiner. Il arrive même que le fait de remettre une tâche à plus tard permette de recharger ses batteries ou d’être dans de meilleures dispositions physiques ou psychologiques pour ensuite vaquer à ses occupations plus efficacement.
En revanche, la procrastination devient « anormale » ou problématique lorsqu’elle est fréquente, qu’elle engendre des conséquences émotionnelles ou fonctionnelles et lorsqu’elle empêche la mobilisation de stratégies efficaces pour bien réussir ses études universitaires.
Quelques explications de la procrastination
En plus des facteurs précédemment cités, comme l'horaire chargé, la fatigue, l'anxiété de performance ou le perfectionnisme, la procrastination peut aussi découler du désir de faire une activité plus plaisante que d'étudier. Il n’est pas toujours facile de se motiver et certaines matières ou sujets particuliers sont plus intéressants que d’autres ou s’arriment davantage avec nos intérêts.
La procrastination peut aussi être expliquée par la nature de la situation d'apprentissage. Il est en effet normal de ne pas tout comprendre du premier coup, de vouloir questionner les objectifs, les exigences ou les méthodes d'évaluation. Ces questionnements sont légitimes. En revanche, il peut arriver qu'ils prennent une place trop importante : ils alimentent alors l'anxiété de performance et justifient la procrastination. Ici, il peut être utile de se rappeler qu'aux études comme dans la vie professionnelle, nous n'avons pas le contrôle des exigences, des méthodes d'évaluation ou des consignes qui nous sont données. Les études universitaires sont souvent une opportunité pour affûter la justesse de notre sens critique, entraîner nos capacités de résolution de problèmes et notre créativité face à l'inconnu !
Comment mieux gérer la procrastination
La procrastination se gère comme les autres comportements d’évitement. D'abord, il faut commencer par comprendre ces comportements. Accordez-vous un moment de réflexion et évaluez les tâches qui vous amènent à procrastiner. Est-ce les lectures pour les cours, la recherche de sources scientifiques, l’étude pour un examen, la rédaction d’un travail individuel ou d’un travail d’équipe ou est-ce plutôt la rédaction de votre mémoire ou thèse ou votre travail dans un laboratoire de recherche? Le fait de prendre conscience des causes permet de bien définir les contours du problème et d'anticiper ce qui déclenche votre procrastination.
Il est également très utile de bien comprendre les pensées et les émotions associées à la procrastination. Voici quelques exemples : « je suis plus productif sous-pression », « je travaille plus vite et efficacement quand je suis à la dernière minute », « j’ai encore le temps, l’examen est seulement dans trois semaines », « je ne suis pas assez motivé aujourd’hui », « je n’ai que trente minutes à y consacrer, cela ne sert à rien de débuter mon travail », « je vais y revenir plus tard lorsque mes idées seront plus claires », « je ne comprends pas pourquoi je devrais réaliser cette tâche », « les travaux d’équipe me stressent », « j’ai peur d’être nul » ou « l’ampleur de ce travail ne fait aucun sens, je n’y arriverai jamais ». Lorsque vous avez identifié la ou les pensées qui vous incitent à procrastiner, vous pouvez utiliser des outils pour les questionner, les restructurer. Par exemple, demandez-vous :
- Est-ce que cette pensée est basée sur des faits ou sur des suppositions ?
- Si un ami avait cette pensée, que lui dirais-je ?
- Quelle est la pire chose qui pourrait arriver ? Et la meilleure ?
- Y a-t-il d'autres façons d'interpréter cette situation ?
- Quelles sont les preuves qui soutiennent et contredisent cette pensée ?
- Si je regarde la situation dans un an, comment la verrais-je ?
Une autre étape consiste à remarquer quelles activités remplacent habituellement la tâche scolaire à effectuer. Par exemple, est-ce magasiner, faire des tâches ménagères ou des emplettes, naviguer sur Internet ou sur les médias sociaux, regarder des émissions ou des séries télévisées, sortir avec des amis ou encore accepter une ou des tâches que vous n’avez pas nécessairement le temps de faire? Ainsi, quand vous allez prendre conscience que vous naviguez sur les médias sociaux au lieu d’étudier, vous pourrez prendre les moyens nécessaires pour éviter le plus possible cette situation (p.ex., désactiver les notifications, laisser votre téléphone cellulaire dans une autre pièce) et vous remettre plus rapidement à la tâche.
La planification et l'organisation sont également des outils très précieux pour contrer l'apparition de la procrastination. Prenez du temps pour établir un plan d'action et diviser une grande tâche en petites tâches.
Il existe beaucoup d'autres façons de se motiver et le service d’aide aux étudiants de votre université est une excellente ressource, une mine d’or de conseils. Le fait de parler de vos défis avec des collègues, des auxiliaires d’enseignement ou des professeurs peut être très profitable, d’autant que les étudiants plus avancés dans leur parcours et les professeurs ont acquis une expérience à cet effet. Trouver des moyens de récompenser ses efforts et sa persévérance peut également être très utile. Après un effort mental soutenu, un examen terminé, la lecture d’un texte ardu ou peu captivant, n'hésitez pas à écouter de la musique, prendre un bain, aller marcher, chercher une crème glacée, regarder la vidéo youtube d'un bon créateur, se faire un thé, aller regarder le coucher de soleil dans votre endroit préféré. Ce ne sont que des exemples, à chaque personne ses envies.
Par ailleurs, les études sont un temps de découverte et d'apprentissage. Il est donc normal de composer avec une certaine incertitude ou de ne pas sentir que tous les aspects d'une matière ou les façons efficaces de réaliser un travail sont maîtrisés. Ne vous jugez pas trop fort si vous n'atteignez pas la perfection ou que vous ne réussissez pas du premier coup!
Il existe de nombreuses stratégies pour faire face à l'évitement. Notre formation Surmonter l'anxiété de performance au cours des études universitaires en présente beaucoup. Nous l'avons conçue spécialement pour vous, n'hésitez pas!
Conclusion
La procrastination est souvent associée à l’anxiété de performance. Elle peut engendrer des conséquences importantes. Cependant, en mettant en place des stratégies basées sur la compréhension de vous même, de vos pensées et de vos émotions, vous pourrez bientôt relever les défis de vos études! Enfin, si vous avez l'impression d'avoir tout essayé et que vous n'y arrivez pas tout seul, n'hésitez pas à demander de l'aide. Rien de tel que de s'appuyer sur le cerveau d'un collègue, un professeur, un professionnel de la santé mentale ou un psychologue pour dépasser une situation difficile.