Et si nous revoyions en profondeur la formation des psychologues?


Une main tient un stylo

Photo de Unseen Studio



Au bas mot, il faut entre 7 et 11 ans d’études universitaires, parfois légèrement plus, pour former un psychologue. C’est nettement plus que pour former un médecin, lequel aura pourtant un champ d’exercice beaucoup plus large…

Est-il donc temps de revoir en profondeur la formation des psychologues? Oui, de toute évidence, mais cela nécessiterait un véritable désir d’améliorer la situation et surtout, du courage, beaucoup de courage, celui par exemple de faire de façon totalement différente de ce qui se fait ailleurs en Amérique du Nord.

A commencer par exemple par considérer l’idée de développer et permettre l’accès à un doctorat différent du Ph.D. dès le début des études universitaires, comme cela se fait en médecine, et non seulement après avoir complété un diplôme de premier cycle de 3 ans. Il ne s’agirait pas d’abandonner les diplômes de premier cycle en psychologie. Ceux-ci demeureront toujours pertinents pour les personnes désirant avoir une formation introductive en psychologie, utile à bien d’autres professions des domaines médical et social, ou permettant d’exercer par exemple à titre d’agent de relations humaines dans le système public. Aussi, avec environ 2000 nouveaux étudiants qui s’inscrivent au baccalauréat au Québec chaque année, ce diplôme de premier cycle est une source de financement significative pour les universités; on ne peut leurs demander d’y renoncer. Par ailleurs, on pourrait facilement imaginer que les étudiants qui performent bien au baccalauréat puissent faire un passage vers ce nouveau doctorat 2.0 avant même de terminer leur formation de premier cycle.

Pour ce faire, il faudrait cependant se pencher très sérieusement sur la pertinence des cours normalement complétés au baccalauréat - ils ne sont pas tous à ce point pertinents - et déterminer lesquels seraient toujours exigés dans ce doctorat 2.0. Les maitrises en psychologie qui sont encore exigées par certaines universités pour l’admission au doctorat, telle McGill (en psychologie du counselling), devraient être abandonnées. Il en va de même pour certains cours couramment exigés par les universités dans le cadre du doctorat, lesquels vont au-delà des exigences de l’Ordre des psychologues du Québec. Il faudrait ainsi s’attaquer à certaines chasse-gardées en milieu universitaire, par exemple ces cours que certains professeurs estiment parfois à tort nécessaires à la formation des psychologues, alors que leurs motivations sont autres, que ce soit par idéologie ou croyance, ou encore pour ne pas perdre un cours dans lequel ils ont beaucoup investi et devoir en développer de nouveaux…

Il faudrait aussi recentrer la formation en psychologie sur l’essence même de la psychologie. Avec la radicalisation que l’on observe autour de certaines idéologies, notamment les mouvements dits antiracistes ou de justice sociale ou en matière d’équité, diversité et inclusion, il est de plus en plus évident, notamment dans les universités anglophones, que nous nous éloignons de notre telos. La raison d’être de la psychologie n’est pas l’antiracisme ou la justice sociale. C’est de comprendre et changer le comportement. Ceci n’implique aucunement que les psychologues ne puissent pas s’investir activement pour améliorer notre société de façons diverses. Ils le font déjà, comme d’ailleurs bien d’autres professionnels du champ médico-social. Mais là n’est pas la mission première de notre profession.

Il faudrait par ailleurs repenser le contenu et la nature de la formation en recherche. Les psychologues détenteurs d’un doctorat sont forts en recherche, notamment ceux qui détiennent un Ph.D. Or, très peu utilisent pleinement ces compétences une fois diplômés. Il serait donc pertinent, pour ce doctorat 2.0, de revoir le volet recherche, en misant plutôt sur l’utilisation des données scientifiques plutôt que sur la production de nouvelles découvertes scientifiques.

Il serait aussi nécessaire d’oser, oser repenser nos exigences quant à la formation pratique, non pas en termes de durée mais en termes d’exigences de supervision. Par exemple, dans le cadre des stages (700 heures au total), il est nécessaire de compléter un minimum de 250 heures de contacts variés avec les patients (de l’observation, etc.), y compris 100 heures de contact direct. Or, dans le cadre de ces mêmes stages, il est obligatoire de recevoir 125 heures de supervision, dont 50 heures de supervision individuelle, la balance pouvant être de la supervision de groupe. Pour simplifier, pour chaque heure passée directement ou indirectement avec un patient, le psychologue en formation doit recevoir une demi-heure de supervision; pour chaque heure passée en contact direct avec un patient, il doit recevoir une demi-heure de supervision individuelle. Pour l’internat (1600 heures), il lui faut recevoir une heure de supervision individuelle pour chaque 4 heures de contact direct avec la patientèle. C’est beaucoup, surtout lorsqu’on considère la formation du médecin, dont le champ d’exercice est beaucoup plus large - faut-il le rappeler -, où il n'existe aucune exigence comparable…

Est-ce à dire que les connaissances et services offerts par le psychologue, certes complexes, sont en fait beaucoup plus complexes que l’ensemble des connaissances et soins prodigués par le médecin? La question se pose quand même…

Martin Drapeau, Ph.D.

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